essais de traitabilité
Temps de lecture :étude de la décantation naturelle et du débourbage
Dans le cas d’eaux fortement chargées en MES (supérieures à 2 g · L–1), il est souvent nécessaire de mettre en œuvre une étape préliminaire de dégrossissage.
La décantation en éprouvette est suivie en fonction du temps (MES de l’eau décantée et pourcentage des boues) et permet d’apprécier la vitesse de décantation des particules, le volume de boues engendré et leur concentration. Si un ajout de réactif s’avère nécessaire, on simulera son action sur un floculateur de laboratoire (voir ci-dessous).
étude de la coagulation et floculation des eaux
Cette étude a pour but de rechercher la nature et les doses de réactifs qui permettent de traiter une eau dans les meilleures conditions (voir chapitre coagulation-floculation) :
- ajout de coagulants et floculants ;
- ajustement du pH ;
- dosage d’adsorbant en poudre ( CAP ).
Il est souvent utile d’ajouter aussi des oxydants (chlore, ozone, dioxyde de chlore). La dose de coagulant nécessaire peut se déterminer, soit par électrophorèse, soit par des essais de floculation souvent appelés aussi « jar-tests ».
électrophorèse
Cette technique consiste à observer le déplacement des colloïdes placés dans un champ électrique. L’appareil utilisé pour cette détermination (Zétamètre) comprend un boîtier de contrôle, une cellule électrophorétique, un dispositif d’éclairage, un microscope binoculaire qui permet l’examen de particules dont les dimensions sont voisines du micron. La mesure de la vitesse de déplacement des colloïdes est manuelle ou automatique. Les déterminations sont effectuées d’abord sur l’eau brute, puis avec des doses croissantes de coagulant. Le potentiel Zêta des particules colloïdales peut être calculé à partir de la vitesse et de la température (voir notice de l’appareil).
Ceci permet de tracer une courbe représentant l’évolution du potentiel (exprimé en millivolts) en fonction de la dose d’électrolyte (figure 7). Dans le cas d’une eau correspondant à la courbe 1 (turbidité essentiellement colloïdale) il suffit d’adopter la dose A de réactif permettant d’atteindre un potentiel de – 3 à – 4 millivolts. En revanche, pour une eau correspondant à la courbe 2 avec forte présence d’algues ou de MO, il est nécessaire d’adopter une dose B annulant le potentiel Zêta.
Le transport de l’eau du lieu de prélèvement au laboratoire affecte peu le résultat de l’étude électrophorétique.
essais de floculation : jar-test
En plus de la détermination de la dose de coagulant, ces essais permettent de visualiser la floculation et de connaître ses effets aussi bien sur l’eau décantée que sur les boues. Ils doivent être effectués à une température voisine de celle que possédera effectivement l’eau au cours de son traitement in situ.
En premier lieu, on expérimente un seul réactif à des doses différentes ; si le résultat n’est pas suffisant, on recommence un nouveau test en répétant le traitement qui a donné le meilleur résultat dans le premier essai et en expérimentant un autre traitement en parallèle. Dans le cas de l’utilisation de plusieurs réactifs, il importe de prendre en compte l’ordre et le temps de décalage entre leur introduction.
Un floculateur permettant d’agiter simultanément, à une vitesse bien déterminée, le liquide contenu dans une série de béchers doit être utilisé pour que les résultats soient comparables. Il faut en effet que la vitesse de rotation, et donc le gradiant de vitesse, soit identique dans tous les béchers ; la valeur optimale est voisine de 40 tours par minute pour une pale de 1 x 5 cm tournant dans un bécher de 1 litre.
Cet essai est effectué pendant 20 minutes et permet de noter les renseignements suivants :
- doses de réactifs et séquence d’injection ;
- aspect de la floculation exprimé par une note :
- 0 : pas de floc ;
- 2 : floc à peine visible, petits points ;
- 4 : petit floc ;
- 6 : floc de dimension moyenne ;
- 8 : bon floc ;
- 10 : très gros floc (> 1 cm)
- pH après floculation.
Pour les meilleurs résultats obtenus, on complète ces indications par les renseignements suivants :
- couleur et turbidité de l’eau décantée ;
- pourcentage de boue après décantation ;
- vitesse de sédimentation diffuse ;
- coefficient de cohésion de la boue ou vitesse de décantation de la boue ;
- oxydabilité au permanganate de l’eau décantée ;
- mesures particulières au traitement étudié : Fe, Mn, COT, microalgues, polluants spécifiques
examen de la sédimentation
L’étude électrophorétique et l’essai de floculation ne suffisent pas pour transposer directement les résultats à une échelle industrielle. La question primordiale étant de savoir à quelle vitesse il est possible de faire fonctionner un décanteur, il y a donc lieu de procéder en outre à un examen de sédimentation.
Deux cas peuvent se présenter :
- floculation relativement peu abondante : si on laisse au repos l’eau floculée, chacune des particules se dépose comme si elle était seule, certaines à grande vitesse, d’autres à vitesse plus faible. Le liquide se clarifie graduellement, un dépôt se forme au fond du bécher, c’est ce que l’on appelle une sédimentation libre ou diffuse ;
- floculation abondante : la sédimentation se produit sur l’ensemble des particules floculées laissant apparaître à la partie supérieure du bécher un liquide clair au‑dessus d’une couche boueuse, c’est ce que l’on appelle la sédimentation freinée ou en piston qui, pratiquement, ne se produit que lorsque l’on traite des liquides riches en matières floculables.
Les mesures à effectuer sont différentes dans l’un et l’autre cas.
mesure de la cohésion de la boue
Si, dans le cas d’une sédimentation diffuse, on ajoute à l’eau une quantité croissante de boue provenant d’un essai précédent, on s’aperçoit que la vitesse de sédimentation augmente. Ceci se produit jusqu’à ce que l’on ait chargé le liquide d’une quantité suffisante de boue pour obtenir une sédimentation en piston. Cette observation est à la base de l’emploi industriel des décanteurs à « contact de boue » ou à lit de boues.
On constate qu’une couche boueuse soumise à un courant d’eau ascensionnel se dilate et occupe un volume apparent à peu près proportionnel à la vitesse de l’eau, selon une relation qui caractérise la cohésion de la boue. On utilise une éprouvette de 250 mL identique à celle de la figure 9 dans laquelle on introduit la boue récoltée dans différents béchers au cours de l’essai de floculation, chaque bécher ayant reçu les mêmes doses de réactifs. On laisse au repos 10 minutes, puis on siphonne l’excès de boue introduite de façon à ne laisser dans l’éprouvette qu’un volume apparent d’environ 50 mL.
On introduit alors dans l’éprouvette un petit entonnoir prolongé d’un tube dont l’extrémité arrive à environ 10 mm du fond de l’éprouvette. Puis, par cet entonnoir, dont la partie supérieure doit s’enfoncer légèrement dans l’éprouvette, à la partie supérieure de celle‑ci, afin d’éviter l’entraînement des bulles d’air, on fait pénétrer de l’eau qui doit être obligatoirement l’eau décantée obtenue au cours de l’essai de floculation pour n’y introduire aucune variation, ni de pH, ni de température. Il est nécessaire d’introduire cette eau d’une manière discontinue par petites quantités, l’excédent de liquide s’écoulant par débordement de la partie supérieure de l’éprouvette.
Ceci a pour effet de mettre la boue en expansion et l’on détermine les vitesses ascensionnelles de l’eau qui correspondent à différents états d’expansion de la boue.
On mesure le temps T (en secondes) correspondant à l’introduction de 100 mL d’eau pour des volumes apparents V mL de la boue égaux, par exemple, à 100‑125‑150‑175‑200 mL.
Pour calculer la vitesse v, si A est la hauteur en millimètres de l’éprouvette qui correspond à 100 mL (distance entre les traits 100 et 200 mL sur l’éprouvette de 250 mL), v est égale à 3,6 A/T m · h‑1.
On représente graphiquement les résultats en portant v en ordonnée et V en abscisse (figure 8).
On constate que la courbe représentative des variations de la vitesse en fonction du volume de la boue en expansion est une droite :
v : vitesse ascensionnelle dans l’éprouvette nécessaire pour obtenir le volume V,
V : volume apparent de la boue en expansion,
V0 : volume de la boue tassée correspondant à une vitesse nulle et mesurée sur le graphique.
Le coefficient « K » est la caractéristique de la cohésion de la boue ; on l’appelle coefficient de cohésion de boue. Il dépend de la température qu’il faut donc noter soigneusement.
Pour une boue bien constituée de décantation rapide, la valeur du coefficient K peut atteindre 0,8 à 1,2.
Au contraire, pour une boue constituée d’un floculat fragile, léger et riche en eau, la valeur du coefficient K peut ne pas excéder 0,3. La mesure de ce coefficient constitue donc un renseignement très précieux pour connaître la façon dont les précipités se comportent dans un décanteur à « contact de boue » et pour déterminer l’influence d’un adjuvant de floculation.
Il n’existe souvent aucune relation entre la grosseur d’un floc et sa cohésion.
mesure de la vitesse de décantation en piston
Lorsque l’essai de floculation produit directement une sédimentation « en piston », il est naturellement inutile et peut être même nuisible d’enrichir le liquide avec de la boue.
On cherche à mesurer directement la vitesse de contraction de la masse boueuse telle qu’elle résulte de l’essai de floculation et telle qu’elle se produira d’une façon naturelle dans un décanteur à l’échelle industrielle.
On procède de la même façon que pour la mesure du coefficient K, mais on travaille à une concentration égale à celle de la boue obtenue en floculant 1 litre d’eau sous examen.
On remplit de liquide floculé l’éprouvette de 250 mL. On laisse tasser la boue 5 à 10 minutes afin que le floc se reforme. Par l’entonnoir, on introduit d’une façon discontinue de l’eau de manière à mettre progressivement la boue en expansion jusqu’à lui rendre son volume apparent initial de 250 mL.
La vitesse trouvée indique la vitesse ascensionnelle qu’il serait théoriquement possible d’admettre dans un décanteur industriel. Elle correspond à la vitesse de la partie linéaire de la courbe de Kynch (voir la décantation en piston des particules floculées dans les différents types de décantation).
Il est bon, à la suite de cette opération, de laisser la boue se tasser spontanément dans l’éprouvette en notant les volumes apparents rapportés au volume initial occupé par la couche de boue en fonction du temps (de 0 à 2 h). Ceci permet de connaître les volumes de boue qu’il y a lieu d’extraire et, par conséquent, de calculer certains organes du décanteur tels que les fosses collectrices de boue, les pales de raclage…
La figure 9 résume les opérations :
- hauteur de l’éprouvette correspondant à 100 mL (A mm) ;
- volume d’eau introduit en 1 minute pour maintenir la couche supérieure de boue au niveau du liquide placé dans l’éprouvette (250 mL) (B mL) ;
- vitesse théorique de sédimentation en mètres vs m · h‑1.
essai de flottation – flottatest (photo 5)
À l’aide d’un ballon d’eau pressurisée, des volumes croissants d’eau pressurisée sont introduits dans différents béchers où l’on a effectué, au préalable, la floculation optimale de l’eau à traiter. On note les caractéristiques suivantes :
- % eau pressurisée ;
- vitesse de montée des bulles ;
- vitesse de montée du floc ;
- aspect du floc ;
- épaisseur du gâteau ;
- mesures sur l’eau flottée : turbidité, couleur, MO… ;
- résistance et aptitude de la boue au raclage.
essai de décarbonatation à la chaux
En principe, le coagulant est le chlorure ferrique, mais on peut essayer aussi le sulfate d’aluminium avec ou sans adjuvant. Dans ce cas, on dose l’aluminium après filtration sur papier (l’aluminium est nettement soluble en milieu alcalin).
On fait un premier essai sans coagulant pour déterminer la dose de chaux en introduisant en même temps 10 g par litre de CaCO3 en poudre (granulomètre 50 μm). Agiter 5 minutes, décanter et filtrer sur papier à filtration lente. Titrer l’eau filtrée et porter les valeurs dans un tableau (tableau 4).
Ensuite, avec la dose de chaux qui a donné, soit un TA supérieur de 0, 5 °F à la moitié du TAC, soit un TH minimal, on fait un nouvel essai de floculation mais avec des doses croissantes de coagulant.
Dans le cas de désiliciage, un autre réactif (magnésie, aluminate…) peut être mis en oeuvre, et le dosage de la silice est pratiqué sur l’eau filtrée. Dans le cas d’adoucissement, le carbonate de sodium doit être utilisé.
détermination des demandes en oxydants
test d’absorption de chlore (demande en chlore)
On utilise une série de flacons ayant tous la même capacité et constitués d’un verre de même composition.
Introduire le même volume d’eau à examiner dans chacun des flacons et une certaine dose de chlore, cette dernière allant en croissant du premier flacon au dernier flacon. Après un temps de contact correspondant en général à la durée de séjour de l’eau dans l’installation, à température constante et à l’abri de la lumière, on mesure le chlore restant dans l’eau de chaque flacon (pour certaines études, il y a intérêt à effectuer cette recherche à différents temps de contact : 1, 2, 5… 24 heures).
On établit ainsi la courbe représentative du chlore résiduel en fonction du chlore introduit (voir oxydation et réduction, figure 93).
Il est toujours recommandé d’analyser le chlore total et le chlore libre, surtout si la courbe d’absorption ne présente pas de point critique afin de déterminer la demande en chlore, en fonction d’un résiduel choisi pour un certain temps de contact. Par ailleurs, certaines mesures spécifiques peuvent être effectuées en fonction de doses croissantes de chlore : formation d’haloformes, couleur, matières organiques, influence sur la floculation, seuils de dégustation
méthode rapide de détermination du point critique
Elle est utilisée en faisant une seule mesure, en introduisant dans l’eau brute une dose de chlore largement excédentaire (E sur la figure 93 de la section oxydation et réduction) ; après contact, la mesure du chlore résiduel (e) permet de déterminer approximativement la valeur du break point, soit E – e.
test de conduite Courbe de cinétique dabsorption de chlore par une eau traitée
Pour un taux de chlore choisi, on mesure les concentrations de chlore libre et total en fonction du temps. Les parties de courbe à examiner, le plus particulièrement, correspondent à la « demande rapide » (moins d’une heure) et aux consommations après un long temps de contact (réseaux longs). Ce test peut donner des indications sur l’utilité des rechlorations en différents points du réseau.
test d’absorption de dioxyde de chlore
Pour connaître la demande en dioxyde de chlore d’une eau, on pratique de la même façon que pour la demande en chlore : on construit la courbe du résiduel du désinfectant en fonction des doses introduites. En présence d’ammoniaque, la courbe ne présente pas de point critique, (le dioxyde ne réagissant pas avec l’ion ammonium). Une solution concentrée de dioxyde de chlore est préparée à partir de chlorite de sodium en présence d’un excès d’acide chlorhydrique.
La concentration de la solution mère est d’environ 15 g · L–1 CℓO2. La solution fille est généralement préparée à 0,5 g · L–1. Cette concentration doit être vérifiée ainsi que l’absence ou la présence de chlorite.
test d’absorption d’ozone
En laboratoire ou sur site la demande en ozone d’une eau est déterminée en utilisant un flacon spécial (figure 10).
On injecte l’air ozoné en A à l’aide d’une seringue graduée. L’ouverture du robinet B permet le déplacement d’un volume d’eau identique au volume d’air ozoné.
Après la fermeture du robinet B, le flacon est agité manuellement durant un temps qui correspond au temps de contact de l’eau dans la tour d’ozonation. L’ozone résiduel est dosé par titrimétrie à la diéthylphénylène diamine ( DPD ) après un ajout d’iodure de potassium.
Le taux d’ozone introduit est donné par la formule suivante :
avec :
C03 : concentration de l’ozone dans le gaz porteur en mg · L–1,
V : volume du flacon (L), v : volume de gaz ozoné (L).
On trace la courbe des concentrations d’ozone résiduel en fonction des taux d’ozone introduit. On obtient en général une courbe (figure 11) dont les points importants sont les suivants :
- le point A intersection de la droite prolongée avec l’axe des abscisses représente le taux d’ozone qu’il faut introduire pour satisfaire la demande chimique de l’eau en ozone et voir apparaître un résiduel d’ozone ;
- le point B de la droite correspond au taux d’ozone qu’il faut introduire pour satisfaire la demande en ozone et obtenir après le temps de contact choisi le résiduel désiré, par exemple de 0,4 mg · L–1.
essai de dégazage‑aération
Il est parfois utile de chasser le CO2 libre d’une eau par ruissellement au contact de l’air. Pour se rendre compte de l’efficacité de l’opération, procéder comme suit : utiliser deux béchers de 1 L. Transvaser l’eau de l’un dans l’autre, en faisant chuter l’eau de 20 cm avec un débit d’environ 1 L en 10 s, doser le CO2 libre et noter le pH en fonction du nombre de chutes et jusqu’à ce que le pH ne varie pratiquement plus.
essai de déferrisation physico‑chimique
La déferrisation par oxydation à l’air n’est pas toujours possible, en particulier pour les eaux riches en MO. Pour s’en rendre compte, il faut procéder à un test. Celui‑ci doit être effectué sur place, immédiatement après le prélèvement des échantillons :
- aérer rapidement en transvasant vingt fois l’eau d’un bécher dans un autre ;
- filtrer sur papier Durieux, bande bleue ou sur membrane 0,45 μm ;
- contrôler la dose de fer résiduel, l’évolution du pH, de l’oxygène dissous et du gaz carbonique.
Si la dose de fer résiduel n’est pas inférieure à 0,1 mg · L–1, il faut effectuer des essais plus complets, si possible sur installation pilote, en mettant en œuvre d’autres oxydants et/ou divers coagulants et floculants (alginates par exemple).