conditionnement chimique
Temps de lecture :Chaque réactif chimique employé a son efficacité propre en ce qui concerne la dimension des flocs formés : grenus avec les réactifs minéraux et plus volumineux avec les polyélectrolytes.
réactifs minéraux
Ils sont mieux adaptés à la déshydratation par filtres-presse (voir filtres-presse), ils conduisent, en effet, à la formation de flocs fins mais mécaniquement très résistants.
De nombreux électrolytes minéraux à cation polyvalent pourraient être utilisés mais, pour des raisons d’économie et d’efficacité, on emploie le plus souvent des sels de fer ou d’aluminium, tels que le chlorure ferrique, à un degré moindre, le chlorosulfate ferrique et le sulfate ferrique, et plus rarement le sulfate ferreux et les sels d’aluminium.
Sur les boues organiques (traitements biologiques d’ERU et d’ERI), l’ion Fe3+ est de loin le plus efficace et le plus utilisé. Le choix entre FeCℓ3 et FeSO4Cℓ est d’ordre économique.
Une introduction de chaux consécutive à celle de l’électrolyte (pH > 10, ce qui correspond encore à un pH de floculation correct), est toujours d’un grand intérêt pour améliorer la filtrabilité :
- diminution du taux d’eau liée (obtention d’un gâteau plus sec et plus consistant) ;
- précipitation d’un certain nombre de sels de calcium (organiques et minéraux) favorables à la filtration ;
- apport d’une charge minérale dense (augmentation de la perméabilité du gâteau).
Avec les boues organiques, le double dosage sel de fer/chaux est obligatoire. En revanche, avec les boues d’hydroxydes hydrophiles, une simple addition de chaux suffit généralement à améliorer la filtrabilité de la boue.
Les doses de réactifs minéraux dépendent bien sûr de la nature des boues à filtrer, mais également de l’efficacité désirée. En première approche, avant filtre-presse, on peut les estimer comme suit (tableau 4) :
Pour l’exploitation correcte des filtres, il est nécessaire de respecter un dosage minimal pour obtenir une filtrabilité suffisante (filtre-presse à chambre : r0,5 de 5 à 15 × 1011 m · kg–1) ; en revanche, les surdosages sont inutiles, n’améliorant que peu les résultats.
Il est toujours recommandé de déterminer, dans chaque cas, par des essais simples de laboratoire, les doses correctes nécessaires. (voir examen des boues et caractéristiques des matériaux les mesures de r0,5 et de CST).
La présence, dans une boue, de fibres ou matières denses minérales conduit à des doses moindres de réactifs. Une forte proportion de matières organiques protidiques agit en sens inverse. L’ajout de réactifs augmente la quantité de matières à filtrer, car une forte proportion des agents chimiques introduits reste sous forme solide dans la boue déshydratée, par suite de la précipitation d’hydroxydes métalliques et de sels de calcium. Il faut donc en tenir compte pour le dimensionnement des appareils de filtration :
- 60 à 70 % de la masse de FeCℓ3 introduit se retrouve dans le gâteau ;
- 80 à 90 % de la masse de Ca(OH)2 introduite se retrouve aussi sous forme solide.
Corrélativement, une certaine partie des réactifs passe en solution sous forme de Cℓ– ou de Ca2+ et se retrouve dans le filtrat.
mise en œuvre des réactifs minéraux
Un excellentmélange des réactifs avec la boue doit être recherché. Un apport d’eau de dilution (pour la solution concentrée de FeCℓ3) et l’utilisation d’un lait de chaux à 50-80 g · L–1, facilitent la diffusion des réactifs dans toute la masse.
La floculation des boues s’effectue dans des bacs agités en série (le premier pour le sel métallique, le deuxième pour la chaux – voir filtres-presse). Les temps de séjour sont de l’ordre de 5 à 10 minutes, ce qui est suffisant pour le grossissement du floc. L’énergie d’agitation est assez élevée (150-300 W · m–3) mais non excessive.
Un temps supplémentaire de mûrissement du floc peut être profitable, mais une agitation prolongée et trop forte détériore la filtrabilité de la boue conditionnée. Un stockage prolongé de la boue conditionnée avant filtration (parfois utile pour l’exploitation des filtres) peut aussi avoir cet effet défavorable, en particulier sur des boues fraîches urbaines insuffisamment chaulées, donc susceptibles d’évolution.
Le transfert de la boue floculée ne doit pas provoquer la destruction du floc : les pompes centrifuges sont ainsi à éviter au profit des pompes de type à rotor excentré. Pour certains types de boues abrasives, les pompes HP à piston/membrane sont préférées.
L’atelier de conditionnement peut être entièrement automatisé, avec asservissement des réactifs au débit et, éventuellement, à la concentration des boues.
les polyélectrolytes de synthèse
choix et dosage
Seuls les polyélectrolytes de synthèse à longue chaîne (hautes masses moléculaires à base de polyacrylamide) sont efficaces, formant des flocs volumineux (quelques millimètres), résistants aux efforts de cisaillement et bien différenciés dans une eau interstitielle clarifiée.
Ces polyélectrolytes ont pour effet :
- d’induire une floculation extrêmement marquée, par formation de ponts entre particules, grâce à leurs longues chaînes. Cette floculation est renforcée par une action « coagulante » dans le cas de polymères cationiques ;
- de diminuer fortement la résistance spécifique de la boue, l’eau libre interstitielle libérée étant très rapidement drainable. En revanche, ces flocs, souvent spongieux et assez hydrophiles, entraînent une augmentation du facteur de compressibilité de la boue.
La structure du floc ainsi obtenu a rendu possible :
- le développement d’appareils de drainage pour épaissir rapidement et efficacement les boues : GDD, GDE, tambours filtrants, tables d’égouttage (voir épaississement) ;
- le développement de filtres équipés de support filtrant à larges mailles (0,4 à 1 mm) donc moins colmatable : c’est le cas des filtres à bandes presseuses de type Superpress et GDPresse, spécifiquement étudiés pour la déshydratation des boues (voir filtres à bandes presseuses) ;
- l’amélioration très sensible des performances des centrifugeuses (débit, mais surtout siccité) par augmentation très nette de la densité des particules rassemblées (voir centrifugation).
Un nombre important de polyélectrolytes est à disposition, et il faut généralement faire appel à des tests simples de floculation, de drainage et de pressage, pour choisir les produits les mieux adaptés (voir tests de drainabilité) ; ces tests permettent :
- de trouver le floc le plus différencié ;
- de juger de la résistance mécanique du floc (important pour la centrifugation) ;
- d’apprécier la bonne drainabilité de la boue floculée (importante pour les filtres à bandes et les appareils de drainage) ;
- de tester la compression du floc drainé ;
- d’estimer l’aptitude ou non au fluage ;
- de juger de l’adhésion du floc pressé à la toile de filtration ; et tenant compte de tous ces points, de choisir le ou les polymères et leur dosage le plus économique.
Le choix définitif du produit s’effectue lors des tests industriels, avec les produits présélectionnés.
Les polyélectrolytes cationiques sont surtout efficaces pour le conditionnement de boues à teneur élevée en matières organiques (MO/MES supérieur à 40 %) ou à teneur élevée en fibres cellulosiques. Pour certaines applications (déshydratation sur filtre-presse par exemple), le polyélectrolyte peut être associé à un sel métallique : précoagulation au sel ferrique et, ensuite, constitution d’un floc moins hydrophile à l’aide du polyélectrolyte.
Les polyélectrolytes de masse molaire moyenne sont plus adaptés au filtre à bandes presseuses (drainage facilité). Ceux de très haute masse molaire, conduisant à des flocs denses et de forte résistance au cisaillement, conviennent mieux à la centrifugation
Les polyélectrolytes anioniques trouvent une large application dans les suspensions boueuses à caractère minéral prépondérant (boues denses hydrophobes, boues d’hydroxydes métalliques). Les doses employées avec ces polymères sont souvent plus modestes de l’ordre de 0,3 à 3 kg · t–1MES.
Pour un mélange de boues organiques (biologiques par exemple) et de boues minérales (hydroxydes par exemple), l’ionicité du polyélectrolyte peut varier en fonction du rapport de coprésence
mise en œuvre des polyélectrolytes
En traitement des boues, les polyélectrolytes utilisés sont livrés en poudre ou, de plus en plus maintenant, sous forme d’émulsion stable. Le chapitre sur les élaborations particulières donne des recommandations générales et des schémas de systèmes de préparation pour ces polyélectrolytes.
Les polyélectrolytes en poudre se préparent généralement à des concentrations de 2 à 4 g · L–1 maximum ; il faut laisser « mûrir » cette solution environ une heure avant de l’utiliser. Généralement les solutions de polyélectrolytes préparées à partir de poudre ne conservent leur totale efficacité que durant 2 à 3 jours.
Les polyélectrolytes en émulsion doivent également être préparés en deux phases :
- inversion de l’émulsion : la solution concentrée est diluée sous forte énergie avec de l’eau potable à raison de 6 à 10 mL d’émulsion par litre d’eau ;
- mûrissement durant environ 20 min sous agitation lente.
Lors de l’utilisation de polymère émulsion il ne faut pas faire la confusion entre la quantité de produit commercial et la quantité de produit réellement actif : en général, les émulsions ont une concentration en matière active (MA) comprise entre 40 et 50 % pour une densité proche de 1.
Pour comparer les consommations de polymères émulsion à celles des polymères poudre, il faut rapporter les dosages en kg de matière active ou en euro · t–1MS.
La solution mère (2 à 5 g MA · L–1) est quelquefois diluée avant introduction dans la boue mais il n’y a pas de règle précise : tout dépend des viscosités respectives de la boue et de la solution de polyélectrolyte. Le mélange boue-polyélectrolyte s’effectue de façon très simple, la floculation étant quasi immédiate, mais les flocs formés sont souvent fragiles :
- pour une centrifugeuse, injection du polyélectrolyte directement dans la conduite de boue, juste à l’entrée de l’appareil, sans utilisation de floculateur, l’énergie engendrée dans la centrifugeuse suffit (voir centrifugation) ;
- pour un filtre à bandes presseuses, injection du polyélectrolyte dans une petite cuve agitée, placée juste en amont de la zone de drainage de l’appareil. Le temps de floculation est très court, généralement inférieur à la minute ;
- pour la GDE ou GDD et les filtres à bandes simplifiés, la floculation peut se faire également par injection du polyélectrolyte en conduite au travers d’un mélangeur statique de type MSC;
- pour un filtre-presse, les modalités d’injection sont plus complexes. Le débit d’un filtre-presse n’étant pas constant au cours du cycle, plusieurs modes opératoires sont possibles : injection avant ou après la pompe HP d’alimentation du filtre presse, en réacteurs ou in-line avec les automatismes adaptés (voir filtres-presse).